À mesure que les conflits se multiplient et se complexifient, leurs conséquences se répercutent durablement sur les femmes et les filles. Dans ces contextes, elles sont exposées aux violences sexuelles, utilisées comme arme de guerre. Face à ce constat, ONU Femmes agit sur le terrain pour prévenir et lutter efficacement contre ce fléau.

Débat public du Conseil de sécurité des Nations unies sur les Femmes, la Paix et la Sécurité, 2017. © UN Women/Ryan Brown

Les violences sexuelles en situation de conflit : décryptage

Qu’elles fassent parties des populations civiles en zones de conflit, en tant que personnes réfugiées ou directement menacées (artisanes de la paix, activistes, journalistes et défenseures des droits humains), les femmes sont touchées de manière disproportionnée par les crises. Elles sont surexposées à plusieurs formes de violences, comme le viol, l’esclavage sexuel ou le mariage forcé. Ces actes sont souvent impunis à cause de l’absence de mécanismes de signalement, de sanction et de protection, ainsi que des facteurs sociétaux qui découragent les dénonciations tels que la stigmatisation et la culture du silence.

Les violences sexuelles sont utilisées comme une arme de guerre ayant pour objectif de terroriser et de déstabiliser la population. Pourtant, il a fallu attendre juin 2008 avec l’adoption de la résolution 1820 par le Conseil de sécurité des Nations unies pour les reconnaître comme telles. Leurs conséquences se répercutent sur plusieurs générations. Par exemple, les traumatismes, la stigmatisation, la pauvreté, les problèmes de santé à long terme et les grossesses non désirées. Mais aussi l’éducation, en effet les conflits prolongés et les guerres perpétuent les écarts dans l’accès à l’école et à l’apprentissage. Aujourd’hui, 54% des filles non scolarisées vivent dans des pays impactés par des conflits (1).

Plus de deux décennies se sont écoulées depuis l'adoption historique de la résolution 1325 qui reconnaît le rôle essentiel des femmes dans l'établissement et le maintien de la paix (2).

Pourtant, alors que les opportunités liées à cet agenda sont nombreuses, des obstacles demeurent. Sur le plan politique, la prise de pouvoir de Kaboul par les Talibans en Afghanistan depuis l’été 2021 et, plus récemment, la guerre en Ukraine, représentent de nouvelles menaces pour la paix et la sécurité internationales, où les femmes et les filles subissent de plein fouet les conséquences des violences. En 2022, l’organisation Human Rights Watch a notamment documenté des cas de viols des ukrainiennes par les soldats russes (3). La même année, les Nations unies ont également constaté des crimes de guerre contre les femmes et les filles dans la région du Tigré et en République démocratique du Congo, suite à l’intensification des conflits dans ces régions. Ces actualités doivent faire la lumière sur le besoin d’intégrer la perspective de genre à la gestion et à la prévention des conflits, en particulier en matière de violences sexuelles.

L’action d’ONU Femmes pour protéger les femmes et les filles des violences sexuelles liées au conflit

En Ukraine, plus de 13 000 femmes gravement touchées par la guerre ont été soutenues grâce aux interventions d'ONU Femmes notamment par une aide humanitaire immédiate (nourriture, eau, abris, médicaments et kits d'hygiène), un soutien psychosocial, l’accès aux informations sur la protection et les services socio-économiques, l’aide et sensibilisation juridiques sur les violences sexuelles liées au conflit (5). En Iran, ONU Femmes soutient vigoureusement les femmes iraniennes victimes de violations de leurs droits fondamentaux, des violences et tortures (6).

En 2021, le « Fonds des Nations unies pour mettre fin à la violence à l'encontre des femmes et des filles » a alloué 74,7 millions de dollars pour soutenir plus de 40 millions de personnes comprenant au moins 22 millions de femmes et de filles. ONU Femmes a ainsi géré 157 projets visant à prévenir et combattre les violences faites aux femmes dans 68 pays et territoires, répartis dans cinq régions (8), parmi lesquels des zones de conflit comme l’Ukraine et l’Afghanistan.

Pour que les principes définis par la feuille de route de l’agenda « Femmes, Paix et Sécurité » (9) soient respectés et les objectifs en matière de violences sexuelles atteints, ONU Femmes soutient les organisations de la société civile. Par exemple, les Fonds pour mettre fin à la violence à l’encontre des femmes a soutenu le travail de l’organisation de la société civile « Women for Afghan Women » (Femmes pour les femmes afghanes), qui a continué à œuvrer sur le terrain, après la prise de Kaboul par les talibans, pour fournir de l’aide aux femmes et aux filles victimes de violences (10).

Ainsi, ONU Femmes déploie également des outils innovants de soutien aux survivantes de violences sexuelles liées aux conflits. À titre d’exemple, un service de santé mentale et de soutien juridique a été mis en place en partenariat avec Bibliothèques sans Frontières (11).

Enfin, avec la création par les Nations unies du « Fonds des Femmes Pour la Paix et l’Action Humanitaire » en 2021, des nombreuses organisations de défense de droits des femmes partout dans le monde ont reçu une aide financière pour la mise en œuvre de projets visant à lutter contre les violences faites aux femmes dans des contextes marqués par les troubles socio-politiques, l’insécurité, et la montée de les violences.

Événement de haut niveau sur le « Réseau des femmes médiatrices : Du papier à la pratique » lors de la 72ème Assemblée générale des Nations unies, 2017. © UN Women/Ryan Brown

Aujourd’hui il faut continuer à lutter contre l’impunité des auteurs, être à côté des victimes, comprendre leurs besoins, leur apporter le soutien et l’aide dont elles ont besoin et faire entendre leur voix. Cependant, il ne faut pas les cantonner au statut de victimes, les femmes exercent un rôle clé dans l’élaboration de processus de paix. Qu’elles soient médiatrices, déléguées des parties à la négociation, signataires, témoins observatrices, représentantes de la société civile, conseillères en matière de genre ou membres de comités techniques, les femmes doivent occuper des rôles de premier plan en tant qu’actrices de changement. Pour lutter efficacement contre les violences sexuelles, il s’agit dès lors de veiller à intégrer systématiquement la perspective de genre dans l’élaboration de politiques et de plans d’action.

Sources

(1) ONU Femmes, Progrès vers la réalisation des objectifs de développement durable, p.2, 2022. Accessible ici.

(2) Résolution 1325 adoptée le 31 octobre 2000 par le Conseil de sécurité des Nations unies, elle entérine officiellement l’agenda Femmes, Paix et Sécurité souhaité par l’ONU.

(3) Human Rights Watch, « Ukraine : crimes de guerre manifestes dans les zones contrôlées par la Russie », 3 avril 2022. Accessible ici.

(4) Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté (WILPF), octobre 2022. Accessible ici.

(5) ONU Femmes, ONU Femmes Ukraine : mise à jour à cinq mois (UN Women Ukraine: five-month update), p.2, 3 août 2022. Accessible ici.

(6) ONU Femmes France, Déclaration d'ONU Femmes sur les droits des femmes en Iran, 28 septembre 2022. Consulté ici le 21 novembre 2022.

(7) UN Trust Fund, Rapport annuel 2021, p.19, 2022. Accessible ici.

(8) UN Trust Fund, Rapport annuel 2021, p.12-13, 2022. Accessible ici.

(9) L’agenda Femmes, Paix et Sécurité fait référence à un ensemble de déclarations et d’initiatives concernant l’importance de l’égalité de genre dans les efforts de paix et de sécurité. Construit sur une série de résolutions adoptées par le Conseil de sécurité de l’ONU entre 2000 et 2019, il encourage une politique sécurité-défense qui intègre la perspective de genre reposant sur quatre piliers (rôle des femmes dans la prévention des conflits, participation à la consolidation de la paix, protection de leurs droits pendant et après les conflits, prise en compte de leurs besoins spécifiques).

(10) UN Trust Fund, Rapport annuel 2021, p.17, 2022. Accessible ici.

(11) « Violences sexuelles liées aux conflits : l’ONU s’associe à Bibliothèques Sans Frontières ». Accessible ici.