Témoignage d'Elena Biceva, psychologue en Moldavie qui soutient les familles ukrainiennes
À la suite de l'invasion de l'Ukraine par la Russie, des centaines de milliers d'Ukrainien.ne.s ont fui vers la République de Moldavie, à la recherche d'un abri sûr. Au milieu de cette crise sans précédent, le gouvernement moldave, la communauté internationale, les organisations de la société civile et de nombreux bénévoles ont uni leurs efforts pour répondre rapidement et efficacement aux besoins des personnes ukrainiennes.
Les personnes concernées sont confrontées à de nombreux défis, notamment celui de maintenir un équilibre psychologique. Pour cette raison, de nombreux psychologues et psychotérapeutes ont commencé à organiser des séances de santé mentale. L'une de ces spécialistes est Elena Biceva, présidente de l'association moldave de Gestalt-thérapie et de psychodrame, qui organise des séances de santé mentale pour les fonctionnaires impliqués dans la réponse à la crise des réfugiés. Elle explique le rôle du conseil psychologique dans les situations de crise, ainsi que la manière de prévenir l'épuisement émotionnel. Voici son témoignage :
“Depuis le début du mois de mai, nous avons organisé quatre sessions de groupe, au cours desquelles nous avons discuté de différents aspects, notamment de ce que nous pouvons faire pour les personnes réfugiées, des signes d'épuisement émotionnel et professionnel, mais aussi de la manière de gérer le stress. Beaucoup de nos bénéficiaires avaient des difficultés à communiquer. […] Beaucoup de nos bénéficiaires ont été confrontés à un épuisement émotionnel, qui a affecté leurs relations avec leurs familles. Ils se sentaient dépassés et ne savaient pas comment gérer leurs émotions.
Dans la partie pratique des sessions, nos bénéficiaires apprennent des méthodes de gestion du stress, expérimentent l'art-thérapie et le psychodrame, travaillent avec des cartes métaphoriques et jouent des rôles. Ces activités les aident à trouver des solutions à différentes situations, ainsi que des ressources pour faire face aux difficultés. À leur demande, nous pouvons organiser également des séances individuelles. En même temps, nous allons travailler sur le stress post-traumatique.
Pour moi, il est très important que les personnes avec lesquelles je travaille trouvent le temps de s'occuper d'elles-mêmes. En règle générale, les personnes impliquées dans la gestion des crises humanitaires vivent et agissent comme si de rien n’était. Ils essaient d'aider davantage et oublient leurs propres besoins et désirs. Mais en prenant soin de nous-mêmes, nous pouvons aider encore plus. Il est extrêmement important que nous, spécialistes de la psychologie, apportions un soutien émotionnel à nos bénéficiaires. Lorsqu'une personne est confrontée à une crise, quelqu'un doit être là pour lui rappeler de prendre soin de sa santé mentale, de faire du sport, d'avoir une routine quotidienne. Sinon, l'épuisement émotionnel est inévitable.
Nous avons tous des traumatismes cachés et des épisodes dramatiques de notre passé. Des situations telles que la guerre en Ukraine font ressortir toutes nos émotions, nos souffrances et nos angoisses. C'est arrivé à tous les bénéficiaires avec lesquels je travaille. Dans le contexte actuel, de nombreuses personnes souffrent en tant que témoins de la guerre. Bien qu'elles ne soient pas attaquées directement, elles souffrent psychologiquement, et ne comprennent pas ce qui leur arrive. Dans de telles situations, il est crucial d'avoir autour de soi des personnes qui nous rappellent que nos sentiments sont acceptables, et que cette situation ne l'est pas.”
Le gouvernement moldave a créé un groupe de travail composé de volontaires au sein du ministère de l'intérieur, qui contribue à l'accueil, à l'assistance et à l'hébergement du flux de personnes migrantes en provenance d'Ukraine. En outre, de nombreux prestataires de services soutiennent le processus. Compte tenu des défis et des pressions auxquels ils sont confrontés, ONU Femmes a demandé à l'organisation dirigée par Biceva de fournir un soutien psychologique et des conseils aux volontaires qui travaillent avec les réfugiés fuyant la guerre en Ukraine.
Initialement publié sur le site de UN Women Europe et Asie Centrale
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