Lettre ouverte de Romane Dicko, judokate double-médaillée olympique

“Je t’écris les mots que j’aurais voulu entendre quand moi-même j’étais une jeune adolescente qui commençait le judo. [...]

Moi, j’ai toujours aimé ce moment, où alors que le combat n’a même pas commencé, tout se joue. L’adrénaline monte dans ton corps, tu ressens l’appréhension de l’autre personne alors qu’elle te salue. Quelle que soit l’issue des quatre minutes de combat, si j’ai tenu le regard, pour moi, j’ai déjà gagné.

En fait, quand t’y penses bien, se battre, c’est la partie facile. Ça s'apprend. N’importe qui peut le faire. Il suffit d’inscrire son enfant au judo à ses trois ans et le forcer à y aller tous les mercredis, il finira par savoir faire un waza-ari comme personne.

Moi, quand j’ai commencé, j’avais 13 ans. C’est tard, ou du moins, c'est ce que les gens disent. Ca, c’est parce qu’on est habitués à voir des champion.nne.s qui t’expliquent qu’avant de marcher, ils savaient déjà nager. Mais ne t’inquiètes pas, c’est loin d’être une généralité, tu n’es pas en retard. Il n’y a pas d’âge pour le talent, encore moins pour la persévérance.

Il suffit de croire beaucoup en toi-même, et de t’acharner. Je ne me suis pas réveillée un matin avec l’impression d’être une combattante, ça a pris du temps. Des gens ont cru en moi, m’ont poussée à en arriver là où je suis. [...]

Quelques années plus tard seulement, je remporte deux médailles à Tokyo. En les passant autour de ma tête, je repense à la Romane de 13 ans, pas très sûre d’elle, qui faisait ce sport d’abord pour s’amuser. Avec du recul, je sais que c’est grâce à cette mentalité que j’ai gagné, parce qu’avant de vouloir être la meilleure, j’aimais ce que je faisais.


Je pense sincèrement qu’on excelle seulement quand on est épanoui.e. Si je suis championne aujourd’hui, c’est parce que j’ai toujours combattu avec plaisir avant toute chose. Alors vas-y, rentre sur ce tatami, et amuse-toi. Joue avec ton adversaire, avec tes limites. Et si tu t’amuses vraiment, alors tu gagneras. Peut-être par le combat, mais beaucoup plus.

Vas-y à fond. [...] Je te dis ça parce que c’est la seule manière de faire quoi que ce soit : à fond. Tu découvriras plus de choses que tu ne l’imagines à travers cette discipline. Tu vas cultiver des valeurs qui resteront pour toujours. Tu vas aussi grandir à travers ton sport. Et tu apprendras à te connaître, à connaître ton corps surtout : ses limites, comment les repousser. Et puis tu apprendras comment l’aimer. [...]

Le judo, ça m’a permis de m’ouvrir, de me découvrir. Je me suis épanouie dans mon sport et du coup, je me suis épanouie dans ma vie. Peu importe qui tu es en dehors, il n’y aucun prérequis pour faire du sport, sur le tatami, on est tou.te.s pareil.lle.s. Le plus important, c’est de ne pas oublier de s’amuser. Le jour où je n’arriverai plus à ressentir du plaisir sur le tapis, c’est le jour où j'arrêterai. [...]

Alors, toi qui me lis et hésites peut-être à t’inscrire au judo. Quel que soit ton âge, ta corpulence, ton niveau sportif. N’hésite plus, vas-y !”

L’intégralité de la lettre ouverte de Romane Dicko est à découvrir ici.